La chanteuse américaine Stacey Kent est une artiste au style si inclassable qu’elle mériterait presque qu’on crée rien que pour elle une catégorie capable de rendre compte de sa singularité. Sublime interprète de ce vaste répertoire de standards auquel les Américains ont donné le nom de « Great American Songbook », Stacey Kent, qui parle couramment le Français et le Portugais, a au fil des années considérablement élargi ses territoires au-delà du jazz en s’aventurant du côté de la chanson et de la bossa nova. Abordant ces genres de façon toujours très personnelle mais sans jamais chercher à en transcender les codes, la chanteuse développe un style si naturellement syncrétique qu’elle ne donne jamais l’impression de transgresser quelque frontière que ce soit pour passer d’un idiome à un autre. Pour Stacey une chanson est un poème dont la mélodie révèle le sens de façon aussi naturelle que les inflexions du langage parlé, proposant un autre niveau d’expressivité, plus émotionnel, mais jamais pathétique.
En 2006, elle signe sur l’emblématique label de jazz Blue Note. La voici soudain en train de passer dans une autre dimension. Même si sur son album précédent, The Boy Next Door (Candid, 2003), Stacey Kent avait déjà commencé à ouvrir son style à d’autres influences, ce n’est qu’à partir du moment où Blue Note lui offrit ce luxe inouï de pouvoir prendre son temps entre chaque projet qu’elle put développer toutes les dimensions de son univers et mettre au point cette manière si originale que l’on retrouve sur ses derniers albums. Comme elle l’a magnifiquement chanté dans sa reprise en 2007 du titre Landslide de Stevie Nick, “Le temps vous rend plus audacieux”…
La Stacey actuelle apparaît réellement en 2007 avec la réalisation pour Blue Note du disque Breakfast On The Morning Tram. Ce qui démarquait alors ce disque de tout ce qu’elle avait fait auparavant, était la présence au répertoire de quatre thèmes originaux écrits tout spécialement pour Stacey par son mari et fidèle partenaire, le saxophoniste Jim Tomlinson, associé au grand romancier britannique Kazuo Ishiguro. Pour la première fois ces chansons offraient à Stacey l’occasion de donner la pleine mesure de son expression musicale personnelle.
Lorsqu’on lui demande de définir son style, Stacey a l’habitude refuser tout forme d’auto-analyse : « Je ne fais que chanter ! » répond-elle immanquablement… C’est ce mélange de facilité et de spontanéité désinvolte que l’on ressent avec une telle force lorsqu’on la voit sur scène. Comme Kazuo Ishiguro l’a si finement noté dans ses notes de pochette à l’album In Love Again, paru en 2001, “Au fil des chansons Stacey Kent trace une route qui mène au cœur émotionnel de la musique en faisant l’économie de toute démonstration technique.”
C'est avec Roberto Menescal que la chanteuse, Stacey Kent, a enregistré "Tenderly" (Sony 2015), une collection intime de standards qui met en valeur sa voix cristalline et la guitare chaude de Menescal. Le magazine 'Jazzwise' qualifie l'album de "très belle rencontre des esprits". C'est ici le seul enregistrement de Menescal en tant que guitariste de jazz. Premier album de standards de Kent depuis une décennie, il montre toutes les qualités d'interprète de la chanteuse avec une technicité toujours plus impressionnante et plus mûre.
I Know I Dream (2017) mêle classiques de la bossa nova, chanson française, standards du Great American Songbook, mais aussi des compositions originales écrites par son mari, le saxophoniste Jim Tomlinson. Les paroles sont co-signées par le célèbre romancier Kazuo Ishiguro (qui a reçu le prix Nobel de littérature 2017), le poète Antonio Ladeira et le parolier de Nashville Cliff Goldmacher.
Avec un catalogue de 11 albums studio, dont Breakfast On The Morning Tram (2007), nominé pour les GRAMMYs et certifié disque de platine (comprenant une liste impressionnante de collaborations), Stacey a gravi les scènes de plus de 55 pays au cours de sa carrière. Quiconque a vu Stacey sur scène sait que la chanteuse n’est pas un personnage de théâtre mais une personne authentique cherchant à exprimer le plus sincèrement possible des émotions vraies et complexes. C’est probablement là que réside le secret de la magie de Stacey Kent. Il suffit qu’elle s’empare d’une chanson pour qu’on n’imagine plus une autre façon de l’interpréter.
La période du confinement en 2020 a donné naissance à un nouvel album intitulé Songs From Other Places en duo avec son collaborateur de longue date, le pianiste Art Hirahara. Au début du confinement, le titre "I Wish I Could Go Travelling Again", écrite par l'équipe de l'auteur lauréat du prix Nobel Kazuo Ishiguro et son collaborateur de longue date et mari Jim Tomlinson, était alors la chanson la plus relayée et demandée par ses fans sur les réseaux sociaux.
Simultanément intime et expansif, Songs From Other Places est une collection variée et éclectique de piano / voix, accompagnée par le pianiste Art Hirahara. L’album comprend des interprétations de Paul Simon, Lennon & McCartney et Stevie Nicks, ainsi que de Gershwin, Weil et Jobim. On y trouve également "Les Voyages", de l’auteur-compositeur québécois Raymond Lévesques, ainsi que deux nouvelles chansons écrites pour elle par Ishiguro et Tomlinson.
Bien qu'enregistré depuis son studio du Colorado, ce nouvel album n'est pas un exercice solipsiste, mais plutôt l'expression du désir commun de se lancer à nouveau dans le monde. "Pendant ces longs mois d'enfermement, beaucoup d'entre nous ont trouvé un moyen d'évasion dans la musique. C'est pourquoi je vous invite à vous joindre à nous dans ces Songs From Other Places, en imaginant d'autres personnes, d'autres lieux et d'autres époques" (SK)
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